Jean-Roch Focant

« Comme l’écrivain devant sa feuille blanche, je suis face à mon panneau de bois. Le format s’est imposé, je ne sais jamais pourquoi je prends celui-ci ou celui-là. Je n’ai aucune idée, aucun projet en tête. Pourquoi ai-je choisi de préparer une pâte jaune ou rouge ou bleue? Est-ce la météo qui m’influence? Ou peut-être est-ce le contact que je viens d’avoir avec des amis?Je n’utilise que très peu de pinceaux. Mes doigts, une cuillère en bois, une vieille fourchette, une éponge, une peau de chamois, un tampon jex, une cuillère à glace, une truelle ou un karcher, ou ….. sont mes outils favoris. La matière est épaisse et donc lente à sécher, je travaille toujours plusieurs panneaux ensemble. Au fil des jours j’ajoute la matière colorée, j’agence les formes, j’équilibre les masses. Lorsque je suis satisfait je m’arrête, j’accroche au mur et je regarde, je tourne le panneau dans les quatre sens; parfois j’ajoute, je retire ou je brûle. J’invite le spectateur à regarder avec son coeur, à écouter ses émotions. Certains découvrent une nature morte, ou un paysage, ou encore un nu. Chacun rencontre une émotion différente ou ne rencontre rien, alors c’est dommage. »

Jean-Roch Focant

La matière s’impose en couleurs primaires (rouge, bleu, jaune), notes d’une partition dont il a décliné toute la substance depuis trente ans et qu’il parvient encore à pousser au-delà de l’existant. De la colle, des pigments, du sable comme matières premières dont il tire une palette de variations qui semble illimitée. Sa peinture est une réécriture toujours renouvelée de la mise en page (son passage professionnel dans le monde de l’impression a laissé son empreinte). On identifie ses maîtres: Rothko, Bogaert et Polock et tout le chemin qu’il a parcouru, poussant bien au-delà l’univers de ceux qui ont ouvert sa recherche et ses réussites artistiques. Une joie nous prend face à ses oeuvres, cette jouissance qui habite son travail, le soleil, le sourire, l’humanité et la nature ne sont jamais loin.

Marc Albert